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L’amour dure trois ans

En 1997, Frédéric Beigbeder publiait « l’amour dure trois ans », chez Grasset.

L’histoire d’un chroniqueur mondain tellement désespéré par son divorce qu’il ne croit plus en l’amour.  « L’amour dure trois ans » est le roman d’un homme amoureux de l’état amoureux.

Cet homme,  c’est Marc Marronnier – alias Frédéric Beigbeder  – qui ne veut vivre de l’amour que la passion, le désir, le manque… « Si votre maîtresse ne vous manque pas au bout de dix minute, c’est que vous n’êtes pas amoureux »

Nous sommes en 2012. Beigbeder n’a plus 30 ans mais 45, et s’il croit toujours que l’amour dure trois ans (il avoue lui-même n’avoir jamais connu d’histoire qui ait dépassé la barre fatidique des  1001 nuits), il le raconte sur grand écran avec un talent et une subtilité affinés.

Ce qui était un pamphlet désespéré et grinçant devient une comédie romantique légère et grinçante.

Le point de départ est presque le même : Anéanti par son divorce, Marc Marronnier a écrit un pamphlet anti amoureux « L’amour dure trois ans ». Or il aime désespérément Alice qui l’aime aussi, bien qu’elle soit mariée. Mais l’enjeu change.  Cinéma oblige, Beigbeder introduit dans son histoire un bon gros obstacle (un peu tiré par les cheveux) : Alice ne doit pas découvrir que Marc est l’auteur de ce pamphlet misogyne,  sinon elle pensera qu’il ne l’aime pas – puisque qu’il ne croit pas en l’amour – et le quittera.  Du coup Marc prend un pseudo… mais il sera démasqué. Alice le quittera comme prévu et retournera chez son mari. Comme on est dans une comédie romantique qui respecte les codes du genre… on aura peut-être  droit au  Happy ending au Pays Basque le jour du mariage du meilleur ami gay (puisque je vous dis qu’il respecte les codes !) de Marc.

Pour moi le film est une réussite. J’ai passé un merveilleux moment de romantisme, de finesse  et de drôlerie. Frédéric Beigbeder aime parler d’amour et il en parle bien. Le film est adroit. Il évite d’être trop bavard et pontifiant, mais garde sa petite touche intello germanopratine. On y cite Shakespeare qui est rangé dans la bibliothèque de la salle de bain. On y cite aussi beaucoup Beigbeder (« Passé trente ans, tout homme encore vivant est un con », « Le divorce est un dépucelage mental »…). Le film est contemporain. Le texto a remplacé le téléphone, les sites pornos les magazines de cul, et le Montana, le Baron et l’hôtel Amour ont remplacé Castel, Le Bus et  le Queen.  Il reste toujours le Café de Flore. C’est évidemment, un film ultra parisien, voire parisianiste. Rien ne nous est épargné, ni le grand journal au grand complet, ni Jonathan Lambert, ni le prix de Flore, ni le champagne bu dans les Louboutin au Montana, ni les multiples clins d’œil d’initiés (toujours très drôles). Ça pourrait agacer, mais il y a aussi la place Dauphine sous la pluie et Guétary sous le soleil.

Tous les acteurs sont formidables, surtout Gaspard Proust en néo Beigbeder et Louise Bourgoin en Alice (je trouve qu’elle ressemble étrangement à Priscilla de Laforcade, une ex de FB). Celles et ceux qui ont lu « Un roman français » retrouveront Guétary, la côte basque, le père et la mère de l’auteur tels que décrits dans le roman. J’ai adoré le choix de Bernard Menez, longtemps considéré comme le plus ringard des acteurs français, pour incarner le père du plus branché des auteurs français ! Joeystarr est presqu’à l’aise parmi les bourgeois, Frédérique Bel et Jonathan Lambert sont hilarants, sans parler d’Anny Duperey, auteure d’un succulent « Je suis une mère célibataire et je vous emmerde ».   La cerise sur le gâteau, c’est la chanson de Michel Legrand « Les moulins de mon cœur » – une de mes chansons préférées au monde – qui sert de fil conducteur à l’histoire d’amour de Marc et Alice, avec un extrait du baiser de l’affaire Thomas Crown et une jolie  surprise à la fin du film.

Ah ! vite ! Il faut aller le voir ! (PS : bande annonce tout en bas du billet 😉

Quelques mots sur le roman que j’avais beaucoup aimé à l’époque , agréable à lire, rapide, stylé et touchant … Après une relecture pour comparaison  à son double cinématographie, je dois dire que je l’ai trouvé presque aussi sympa aujourd’hui, ne serait-ce deux défauts qui ne m’étaient pas apparus à la première lecture :

1/ Frédéric Beigbeder ne cesse de citer des grands auteurs pour étayer sa thèse (…)  comme dans une dissertation de terminale L !  Se référer ostensiblement  à Camus, Sagan, Maupassant, Morand, Fitzgerald… donne-t-il une crédibilité littéraire ?

2/ L’auteur avait alors une très forte tendance à écrire comme s’il débitait de la punchline lapidaire et publicitaire (c’était encore sa période CLM/BBDO).  On dirait souvent que le texte n’est qu’une longue compilation de citations définitives – et de clichés –  sur l’amour, la vie, la mort :

« La seule question en amour c’est : à partir de quand commence-t-on à mentir ?
«  Un moustique dure une journée, une rose trois jours. Un chat dure treize ans, l’amour trois. C’est comme ça. Il y a d’abord une année de passion, puis une année de tendresse, et enfin, une année d’ennui.
« Nous nous sommes quittés comme nous nous étions mariés : sans savoir pourquoi
«  Le culte de la cuite, ça passe à dix-huit ans, à trente c’est pathétique
«  Et si l’adultère m’avait rendu adulte ?
«  La vérité, c’est que l’amour commence dans l’eau de rose et finit en eau de boudin
«  On se marie exactement comme on passe son baccalauréat ou son permis de conduire : pour être normal
«  J’étais fou d’elle parce qu’elle m’échappait (hum !)
« Ce qu’il y a de plus beau chez une femme, c’est qu’elle soit saine (hum hum !!)
«  L’’amour le plus fort est celui qui n’est pas partagé (hum hum hum !!!)
« L’amour est fini quand il n’est plus possible de revenir en arrière (hum hum hum hum !!!!)
…sans oublier l’inénarrable « Les mecs c’est comme les poivrons, il faut les faire mariner »

Devant un tel enfilage de perles, ma foi j’en reste sans voix !

Au final, L’amour dure trois  ans est une excellente comédie romantique française, tellement française qu’elle en démode les classiques américains du genre, et un très joli livre à relire rien que pour se replonger dans les années 90 !

9 Comment

  1. Bonjour Julia
    je vous mets en lien l’extrait du film, dans la salle de bain, avec une citation de Shakespeare. J’espère que ça marchera !
    http://youtu.be/Gj9KZDr2arE

    Sinon voici la citation utilisée :
    “L’amour ne s’altère pas en heures ou en semaines, mais survit jusqu’à la pointe de la fin du temps. Et si ceci est faux et qu’on me le prouve, je n’ai jamais écrit, et personne n’a jamais aimé.”

    bonne journée,
    Tonie

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